samedi 31 janvier 2009

De la prétendue neutralité des enseignants et des manuels

Une réponse à la situation CJMF - Françoise David provoque chez moi le retour d'une réflexion et d'une prise de position quant à la neutralité de l'éducation.

Oublions deux secondes que tous ceux (et ils sont des centaines, dans tous les pays du monde) qui se sont penchés sur la subjectivité des curricula ont conclu non seulement à un curriculum caché et un biais flagrant en faveur de l'élite dominante dans la sélection des contenus, des approches pédagogiques, dans la formation des enseignants, dans l'éloge du positivisme... Nous savons que l'éducation n'est pas neutre. Nous savons que la neutralité dans les phénomènes humains n'existe pas.

Posons-nous plutôt la question à savoir quel type de modèle il est préférable de proposer aux élèves ? Est-ce que je veux être une enseignante qui prétend à l'objectivité, qui sert son programme et présente de façon dite «équilibrée » les «faits» (bien qu'il soit immensément rare que les versions les plus divergentes ne soient disponibles pour fins de présentations) sans prendre position ? Quel type de citoyen cela forme-t-il ? Mes recherches (trois ans, maintenant) à ce sujet, ainsi que mes 9 ans passés en salle de classe me font conclure que cela nous donne un citoyen PASSIF, INDÉCIS, INCAPABLE D'AGIR ET DE PRENDRE POSITION. C'est le citoyen silencieux qui ne réagit pas aux injustices de ce monde. C'est l'apathie face à la société qui ne change pas et s'enlise dans un modèle injuste et vicieux.

Imaginons que nous soyons assez éveillés pour comprendre à quel point l'idéologie dominante est inhérente à l'école dans sa structure, ses programmes, les relations humaines qui y évoluent, etc. Imaginons que le modèle que l'on propose à nos élèves soit celui d'un citoyen engagé, qui prend position, qui explique rationnellement ses positions, preuves à l'appui, qui crée des relations de pouvoir dans la salle de classe où la délibération démocratique est favorisée, encouragée, intuitivement induite chaque fois qu'il y a matière à engagement ou à controverse.

Que les manuels présentent des personnes engagées, qu'elles soient d'un parti politique ou qu'elles aient marqué notre société comme l'a fait Françoise David, cela ne me semble que cohérent avec la finalité de l'école : former des citoyens participatifs, critiques, engagés et orientés vers la justice sociale. Hésiterait-on à placer Michel Chartrand dans un manuel (non, nous l'avons fait dans nos manuels) ? Qu'en est-il de René Lévesque ? Sa présence est-elle une pub pour le Parti québécois ?

Il est impossible d'être neutre. Le prétendre est d'une hypocrisie incroyable. Pire, c'est contraire à notre mission éducative.

vendredi 30 janvier 2009

L'éducation est partout !

Pourquoi ne pas aider les élèves à développer des compétences tout en les éduquant aux médias ?

Demandez aux élèves de lire les articles 214 à 319 du Code criminel du Canada.

Discutez avec eux du sens de ces lois et des conséquences possibles de leur non-respect.

Demandez-leur ensuite de lire le Communiqué de presse de la Fédération des femmes du Québec

et cet article paru dans Le Devoir

Procédez à un débat à savoir si le permis de diffusion du poste de radio CJMF devrait lui être retiré !

Attaque misogyne encouragée chez les élèves

Situation totalement inacceptable. Un animateur de radio sexiste et réactionnaire incite les élèves de quatrième secondaire à déchirer une page de leur manuel d'éthique et culture religieuse, car cette dernière présente Françoise David et sa lutte pour la reconnaissance des droits des femmes.

Selon le communiqué de presse de la Fédération des femmes du Québec : «...sur les ondes de la station de radio 93,3 FM, à Québec. L'animateur, Sylvain Bouchard, avec son concours « Déchirer Françoise David » où il fait tirer un jeu de Guitar Hero, auprès de jeunes adolescents et adolescentes, vocifère contre le fait que l'on retrouve une mention sur Mme David dans un manuel scolaire du cours Ethique et culture religieuse, publié par la maison d’édition La Pensée.

L'animateur radio utilise les ondes à des fins mesquines. Il déblatère contre Françoise David et l'injurie en la traitant, entre autres, de « soviétique ». Il invite les élèves de quatrième secondaire, à qui est destiné le manuel scolaire, à déchirer la page comprenant le passage sur Mme David et à la lui retourner par la poste avec leurs coordonnées.» (http://www.ffq.qc.ca/)

Madame David a consacré sa vie à défendre les femmes et les plus vulnérables de notre société, souvent à grand prix pour elle-même. C'est une femme que j'admire sans borne et un être humain exceptionnel.

Je vous invite toutes et tous à écrire à M. Bouchard et lui faire savoir quel geste exécrable il vient de poser. Rappelez-lui qu'il incite à la haine et que nous ne resterons pas passifs devant ce geste de violence.

Site de l'émission

je vous encourage également à formuler une plainte officielle au CRTC

Enfin, vous pouvez écrire un mot d'appui à Françoise David

Je me fait souvent dire qu'il n'existe plus de situations à étudier avec les élèves pour déconstruire l'oppression dont sont victimes les femmes en Occident. Je crois qu'il est plus que temps d'aborder ces questions avec nos élèves et nos étudiants !

vendredi 23 janvier 2009

un poème pour présenter la guerre

Je vois très bien ce poème dans le contexte actuel ou même en 3e secondaire, dans l'étude de la fédération canadienne (qui traite de la participation des Canadiens aux guerres de l'Empire). Je crois que les enseignants devraient se sentir autant visés que les paternels

LETTRE D'UN SOLDAT À SON PÈRE

Cher papa
Quand tu seras debout au-dessus de ma tombe
Vieux fatigué solitaire
Que tu verras mon corps se recouvrir de terre
Toi en haut, papa, et moi dans la pénombre

N'essaie pas de prendre une posture inspirée
Tête haute regard fier
Profite bien, papa, de notre ultime chair à chair
Bientôt tu n'auras plus que tes yeux pour pleurer

Ne retiens pas tes larmes oublie la dignité
Ne joue pas les vainqueurs
Demande-toi plutôt, papa, si c'est à ton honneur
D'avoir soudain un fils étendu à tes pieds

Ne parle surtout pas de ton grand sacrifice
Le sacrifice c'est moi seul qui l'ai fait
Garde tes grands mots, papa, ils seront sans effet
Je n'entendrai plus rien au fond du précipice

Cher papa
Quand tu seras debout au-dessus de ma tombe
Vieux fatigué solitaire
Que tu verras mon corps se recouvrir de terre
Papa, demande-moi pardon

Hanokh Levin
(Reine de la salle de bains, 1970)