lundi 26 octobre 2009

Leçons à tirer de Braunschweig #1

Colloque de la Société internationale de la didactique de l'histoire sur les manuels scolaires

Peu importe d'où venaient les chercheurs, le plus grand obstacle au développement de la pensée historique chez les élèves était l'examen certificatif (ou normatif) de fin d'année.

Pourquoi ? Il semblerait que les gens qui construisent ces examens croient fermement que ces derniers appellent des bonne réponses, ce qui implique que l'élève qui a construit une interprétation originale et fondée d'une réalité sociale est pénalisé. Pour préparer les élèves à un tel examen, il faut donc leur enseigner la bonne réponse. Et vlan, finie la pensée historique, bienvenue la mémorisation d'un récit unique sanctionné par l'enseignant, le manuel et éventuellement, via l'examen, le ministère de l'Éducation.

Le deuxième plus grand obstacle : les croyances épistémologiques des enseignants d'histoire. Une très grande proportion croient encore qu'il y a une histoire vraie et qui doit être reproduite coûte que coûte (je vois là la Coalition pour l'enseignement de l'histoire de Robert Comeau et cie.). Plusieurs croient encore dur comme fer que les élèves sont incapables d'autre chose que de reproduire ce discours = ils ne seraient certainement pas capable de déployer une pensée historique pour interpréter des documents et construire une explication d'un phénomène social. Et ce, malgré les maintes preuves empiriques qui nous démontrent que même des enfants de 9 ans en sont capables (Cooper et Capita, 2004; Pontecorvo et Girardet, 1993).

Le manuel scolaire est somme toute peu important. Mais lorsque juxtaposé aux croyances épistémologiques d'une forte proportion d'enseignants et aux pressions associées à l'examen de fin d'année (et aux conséquences palmarès des résultats), le manuel peut devenir une arme de destruction - intellectuelle et épistémologique - massive et se transformé en catéchèse détesté des élèves, qui lui associeront l'histoire comme discours imposé.

Trois fronts dans la guerre pour que l'histoire ne serve pas à l'érudition mais à la citoyenneté éclairée et militante
1. éliminer l'examen certificatif ou de fin d'année si celui-ci ne présente pas un problème à régler par la pensée historique et n'évalue pas les opérations cognitivo-épistémiques qui la composent.
2. déconstruire les croyances épistémologiques des enseignants et les rapprocher de l'historiographie savante
3. Rendre la recherche sur la pensée historique et l'apprentissage de l'histoire accessible, afin d'éclairer les pratiques enseignantes.

4 commentaires:

Dominique a dit…

Tout à fait d'accord, même si honnêtement tu utilises des grands mots pour moi, mais leur apprendre a se servir de leur cerveau, à penser, et non leur remplir le cerveau !
leur bourrer !!!!!!

De toute façon, ils s'en rendent compte, et perde intérêt... C'est une des raison pourquoi les jeunes aujourd'hui sont si individualistes tu sais.

Stéphanie Demers a dit…

tu as bien raison Dominique, mais il y a encore trop d'enseignants qui croient qu'enseigner consiste à donner leur show... c'est-à-dire qu'ils enseignent sans se préoccuper si les élèves apprennent. Mais ils se font plaisir, et sont ainsi tout aussi individualistes que les jeunes qui se replient sur eux mêmes faute de trouver un enseignant qui leur témoigne respect pour tout ce qu'ils ont a lui apprendre

Missmath a dit…

Parlant d'épistémologie, je serais bien curieuse de lire ton avis du livre de Normand Baillargeon Contre la réforme...

(Je peux te passer le mien si tu ne l'as pas.)

Stéphanie Demers a dit…

Mon avis n'est pas très positif, Missmath. je crois qu'il a tout à fait tort, qu'il se base sur des arguments non scientifiques (comme les partisans de l'enseignement explicite, d'ailleurs) et passe outre à la fois la nature du savoir (comme construit et ce, socialement) et le danger grave qui guette toute société qui délègue à un groupe le choix de ce qui est digne du nom «connaissance».

ironique, considérant ses positions politiques