mercredi 24 septembre 2008

De la régulation sociale en première année

J'ai essayé de me retenir, mais ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas forte sur l'autocensure.

Nous avons reçu un message d'une enseignante-spécialiste du fiston de première année nous indiquant qu'il devait avoir en tout temps pour ses cours son carnet de comportement.

Vous avez bien lu.

Il n'y a pas de carnet d'apprentissage. Il n'est pas question d'apprentissage dans cette lettre d'environ 250 mots, mais de mémorisation de mots de vocabulaire, des punitions pour les élèves qui n'auront pas le carnet de comportement ou tout autre matériel obligatoire et de comportement.

Bon... si je comprends bien, Félix devra se plier à la norme comportementale telle que comprise par l'enseignante (qui hérite de cette norme que lui impose le discours hégémonique qui nous rend serviles, dociles, ignares, malléables, etc.). Toute «déviation» à cette norme est consignée soigneusement dans un carnet et je saurai si par exemple, Félix est privé du jeu libre du vendredi après-midi parce qu'il jouait avec son bâton de colle pendant que l'enseignante parlait.

À la fin de son parcours scolaire, Félix aura appris à obéir sans questionner, à être conforme à la norme et à s'approprier les discours insidieux des puissants qui l'oppriment sans qu'il se s'en rende compte ?

Over my dead body !

Mon travail de maman ? déconstruire le discours de l'école pour faire découvrir où il mène. Charles a fait un travail brillant en ce sens hier soir au souper, avec tous les enfants. La norme et la régulation sociale, ce sont les outils des fascistes qui font faire leur sale besogne par une population complice et endormie.

Mon travail en tant qu'enseignante au bac en enseignement ? Le même.

5 commentaires:

Clément Laberge a dit…

Bonsoir Stéphanie,

Je suis d'accord avec toi sur le fond, mais je me demande s'il n'est pas possible de montrer aux enfants à « respecter les règles » non pas par soumission, mais par stratégie, pour avoir l'écoute de l'autorité (quand c'est nécessaire) pour être en mesure de proposer autre chose.

Concrètement, former des leaders qui sauront utiliser les règles en vigueur pour les remettre en question au lieu de seulement former de marginaux autonomes.

Qu'en penses-tu?

Stéphanie Demers a dit…

Bonjour Clément

ce que propose et que je pratique, c'est de délibérer avec les enfants pour que l'on établisse les règles ensemble. L'école est leur milieu de vie, après tout, ils doivent y avoir le droit de cité. De plus, l'adhésion à des règles de vie qui sont issues d'un processus auquel ils auront participé est non seulement plus facile, elle est aussi légitime (contrairement aux règles imposées, qui n'ont rien d'un contrat social).

Par ailleurs, ce que je prône par-dessus tout, c'est que chaque classe possède ses propres institutions de délibérations et de gestion démocratiques. J'aime bien les conseils de coopération, par exemple, pour assurer 1) la résolution pacifiste des conflits, y compris avec l'enseignante; 2) l'apprentissage de la délibération démocratique; 3) l'élaboration de procédures qui permettent d'établir l'égalité intersubjective parmi les élèves et l'enseignante; 4) l'autocorrection par la délibération de ce microsystème lorsque nécessaire.

Enfin, sans discussion sur l'origine du pouvoir enseignant - qui est une discussion qu'on peut facilement avoir avec des élèves du premier cycle du primaire, à savoir le mandat social d'éducation, la responsabilité légale en termes de sécurité des enfants et la reconnaissance des compétences des enseignants - et des possibilités du pouvoir des élèves (le pouvoir de décider ensemble les problématiques à étudier, les critères d'évaluation, les règles de vie, le pouvoir d'apprendre indissociable du droit à l'erreur, etc.), le tout ne peut que demeurer un exercice scolaire. Nous devons aller plus loin et redessiner les relations de pouvoir dans la salle de classe, sinon nous ne formons pas des citoyens éclairés, libres et égaux.

Anonyme a dit…

Terrible, terrible, TERRIBLE! On ne forme pas ainsi des citoyens par la menace. La citoyenneté repose sur des valeurs, non sur des objets de motivation extrinsèque.

Stéphanie Demers a dit…

C'est tellement skinnerien comme approche... On a repenser nos approches pédagogiques, les contenus d'apprentissage, mais pas la gestion de classe. Pourquoi ? Le béhaviorisme va à l'encontre de toutes les valeurs présentes dans les domaines généraux de formation, il est en contradiction totale avec la finalité de l'école et les nouveaux fondements que nous tentons de donner à l'éducation.

le conseil de coopération ou toute autre forme de gestion participative et démocratique est plus longue à implanter, certes, mais combien plus valorisante et formatrice qu'un carnet de comportement !

Missmath a dit…

J'aimerais simplement surligner le fait que ceci se passe en PREMIÈRE année. C'est absolument terrifiant.