samedi 10 mars 2012

Qui a peur des étudiants

M. Charest, j’étais avec mes étudiants au Palais des Congrès de Gatineau le 8 mars 2012 alors que vous y vendiez votre Plan Nord. Nous avons demandé à vous rencontrer à plusieurs reprises, vous ne vous êtes jamais présenté.

Nous avons «envahi» l’édifice dans lequel vous vous trouviez, mais n’avons vu personne qui avait peur. Au contraire, nous avons vu des travailleuses et travailleurs nous applaudir, nous encourager, certains sont venus nous serrer la main. Les étudiants ne font pas peur aux Québécois, M. Charest.

Les Québécois ont plutôt peur de ce que font leurs dirigeants et leur bras armé.

Ils ont peur de voir leurs enfants matraqués et gazés dans les rues. Ils ont peur de voir leurs ressources collectives vendues aux plus offrants. Ils ont peur des reculs sociaux et culturels provoqués par les politiques de votre gouvernement. Ils ont peur de la concentration du pouvoir aux mains d’une élite corrompue et dont les intérêts n’engendrent qu’oppression et misère.

J’ai peur, pour ma part, quand vous envoyez vos acolytes dans les universités pour subordonner le financement de la recherche aux intérêts de cette élite corrompue. Quand vous exigez des scientifiques qu’ils légitiment vos politiques dévastatrices pour les Québécois et l’environnement. J’ai peur de vos ministres misogynes (comme M. MacMillan), de votre refus d’écouter les experts (comme le Conseil supérieur de l’éducation), de votre complicité avec l’entreprise privée, aux dépens de l’intérêt collectif et du bien commun. J’ai peur de vous voir écraser la dissension.

Mais je n’aurai pas peur longtemps.

Parce que la nation québécoise s’est toujours définie par ses luttes. Ses luttes pour sa survie culturelle, certes, mais aussi pour les principes démocratiques inspirés par les Lumières, pour la démocratisation des institutions publiques, pour la justice sociale, contre l’oppression des travailleurs, contre l’oppression par l’Église, pour les droits des femmes, contre l’impérialisme économique et le colonialisme sous toutes ses formes. C’est un héritage porté au quotidien par les travailleuses et les travailleurs québécois et aujourd’hui, par les étudiantes et étudiants qui mettent leur sécurité physique en danger pour défendre le droit à l’éducation, ce précurseur de l’exercice de tous les droits.

Et ils n’ont pas peur de vous.

Parce que leur cause est juste, leur comportement éthique, leurs demandes formulées pour le bien commun. Ils font leur juste part et plus. Ils luttent pour les générations futures. Ils seront les infirmières qui nous soigneront, les enseignants qui formeront les citoyens de demain, les scientifiques et ingénieurs qui trouveront les solutions aux problèmes que nous affronterons, les artistes qui dynamiseront la culture. Ils se tiennent devant vous, bien que vous soyez caché derrière les hommes d’affaires, les policiers, des «porte-parole» et autres. Ils vous attendent.

Qui a peur des étudiants ?

3 commentaires:

Paul Leduc Browne a dit…

Bravo! À ton texte si éloquent, on pourrait ajouter que les étudiantes et étudiants d'aujourd'hui, en plus d'être les infirmières, les ingénieurs, les enseignants et les artistes, seront aussi les écrivains, les cinéastes, enfin, toutes celles et tous ceux qui raconteront ce qui se passe aujourd'hui et témoigneront de l'iniquité qu'elles et ils subissent au nom de la pensée unique.

Stéphanie Demers a dit…

J'aimerais bien être dans ta tête, Paul, pour donner à la mienne tous ces outils que tu maitrises si bien !

C'est si vrai ! Ils surveilleront, ils seront témoins et ils n'oublieront pas. Ils ont le devoir permanent d'aiguiser leur pouvoir d'analyse, de nourrir leur indignation face à l'injustice et d'agir en conséquence.

Paul Leduc Browne a dit…

Merci pour ces bons mots!