Je revendique les liens pédagogiques qui
m’unissent à tous les étudiants qui luttent ensemble aujourd’hui et depuis des
semaines pour la justice sociale, pour la reconnaissance de leur droit de cité,
contre la violence symbolique de l’État actualisée dans la brutalité
policière. Je revendique ces liens qui
unissent ceux qui apprennent ensemble, qui se conscientisent ensemble. Freire disait que la tâche de l’éducateur-élève «…consiste
à transcender l’ingénuité qui se laisse tromper par les apparences; nous
acquérons ainsi l’attitude critique qui perce l’obscurité du lieu commun
apparent, et nous met en face du fait qui était dissimulé jusqu’alors.»
(Freire, 1973, p. 193). Face à la trahison des injonctions, face aux matraques
des policiers, l’indifférence de trop de nos concitoyens, les injures, insultes
et menaces des ténors du capitalisme et les chantres de l’individualisme (qui
ne font qu’un) incarnés tels qu’ils le sont dans ce gouvernement de mépris et
de corruption systémique, je revendique ces liens pédagogiques pour proclamer
que l’obscurité est percée et que rien ne saura la couvrir à nos yeux.
Je revendique les liens de solidarité et
d’intentions éducatives qui m’unissent à mes collègues professeurs et
enseignants à travers le Québec, ceux qui luttent pour que la légitimité et
l’urgence du mandat social qu’ils ont accepté de porter soient reconnues à leur
pleine valeur. L’éducation leur est confiée afin que le citoyen, sa conscience, ses savoirs et son pouvoir d’action
soient habilités et incarnés dans l’action dans le seul but d’assurer la vie bonne et la
liberté de chacun et de tous, la justice… bref, la transformation de la société
actuelle. Je reconnais l’imposture de l’institution universitaire telle qu’elle
existe actuellement et dans sa fonction de reproduction sociale. Je reconnais
toutefois la puissance de la culture et du savoir construits collectivement et
habités par ceux qui les construisent. Je reconnais que la préséance de ces
savoirs sur l’imposture ne peut s’établir que par un effort monumental. Je
revendique les liens avec mes collègues pour amorcer ce travail.
Je
revendique les liens citoyens qui m’unissent à tous ces camarades au front
depuis le début de leur combat militant contre l’injuste, le mal, le laid, le
faux qui habitent les relations humaines asymétriques, cruelles et indécentes.
Ces relations qui caractérisent l’asservissement, l’oppression, l’aliénation
propres aux sociétés capitalistes et qu’il devient urgent de transformer par la
praxis citoyenne critique.
Je
revendique ces liens et je les invoque, maintenant, afin qu’ils tirent plus
fort que ces ficelles de marionnettes que nous portons malgré nous, qu’ils nous
lèvent tous ensemble et qu’ils nous soutiennent face aux obstacles dressés
devant nous. Afin que la ministre qui «négocie» et ses patrons [qui ne siègent
pas à l’Assemblée nationale, mais dans les entreprises privées, dans les
banques] voient que nous resterons ensemble, unis.
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