Bons
sont les méthodes et moyens qui élèvent la conscience de classe des ouvriers,
leur confiance dans leurs propres forces, leurs dispositions à l'abnégation
dans la lutte. Inadmissibles sont les méthodes qui inspirent aux opprimés la
crainte et la docilité devant les oppresseurs, étouffent l'esprit de
protestation et de révolte, ou substituent à la volonté des masses la volonté
des chefs, à la persuasion la contrainte, à l'analyse de la réalité, la démagogie
et la falsification. (L.T., 1938)
Nous sommes face à un changement de
garde. Ceux qui ne veulent que pour eux, dans un élan de préservation de classe,
de «survivance pourrissante» de leur pouvoir, où tous les moyens sont bons, soient-ils
frauduleux ou immoraux, sont face aux conséquences de l’adéquation linéaire et
tragique entre ambitions et moyens. Des injonctions aux balles de caoutchouc, en passant par le matraque et les arrestations massives. De leur trahison émerge toutefois un nouvel
ordre, porté par des esprits critiques et conscients qui écartent «les
magiciens, les charlatans et les professeurs importuns de moral»[1]
et qui refusent de corriger le passé, plutôt que d’apprendre de lui.
De faux alliés leur ont recommandé
d’arrêter la lutte. De diluer leurs aspirations. D’être stratégiques en
suspendant leurs revendications. Les étudiantEs ont
toutefois compris que cette lutte n’est pas singulièrement celle de l’accès aux
études universitaires. Cette lutte a comme noyau l’injustice, où qu’elle se
trouve dans les replis malades de cette société sclérosée. Ils nous appellent à les rejoindre dans un mouvement collectif de refus global du modèle social
dominant.
Les
frontières de nos rêves ne sont plus les mêmes.
Que
ceux tentés par l'aventure se joignent à nous. Au terme imaginable, nous
entrevoyons l'homme libéré de ses chaînes inutiles (...).
Les vitrines illusoires du discours hégémonique qui nous cachaient la vérité sont fracassées.
D'ici là, sans repos ni halte, en communauté de sentiment avec les assoiffés d'un mieux être, sans crainte des longues échéances, dans l'encouragement ou la persécution, nous poursuivrons dans la joie notre sauvage besoin de libération.[2]
Les vitrines illusoires du discours hégémonique qui nous cachaient la vérité sont fracassées.
D'ici là, sans repos ni halte, en communauté de sentiment avec les assoiffés d'un mieux être, sans crainte des longues échéances, dans l'encouragement ou la persécution, nous poursuivrons dans la joie notre sauvage besoin de libération.[2]
Je propose qu’on les suive. Je dis bien «suivre». Parce que dans l’émergence de cette
contestation populaire, dans cette situation historique, ce sont les étudiants
qui ont su orienter l’action. Ils n’ont
pas peur d’être «engloutis vivants». «Un
peu de lumière se fait à l'exemple de ces hommes [et de ces femmes] qui
acceptent les premiers les inquiétudes présentes, si douleureuses, si filles
perdues. Les réponses qu'ils
apportent ont une autre valeur de trouble, de précision, de fraîcheur…»[3]
Je propose qu’on les aide à analyser et
mettre au jour les dérives du système qui nous a menés à cette impasse :
«éclairer quels sont les revenus et les dépenses de la société, à commencer par
l'entreprise isolée; à déterminer la véritable part du capitaliste individuel
et de l'ensemble des exploiteurs dans le revenu national; à dévoiler les
combinaisons de coulisses et les escroqueries des banques et des trusts; à
révéler enfin, devant toute la société, le gaspillage effroyable de travail
humain qui est le résultat de l'anarchie capitaliste et de la pure chasse au profit.»
La honte du servage sans espoir fait place à la fierté d'une liberté possible à conquérir de haute lutte.
Je propose l'élaboration d'un projet
éducatif en fonction d’un idéal social consensuel, qui inclut des mécanismes
d’autocorrection pour éviter les dérives identifiées plus haut. Je propose que
tous ceux qui sont capables de laisser les intérêts particuliers et
corporatistes de côté y participent et que ce projet couvre l’éducation du
centre de la petite enfance jusqu’aux études doctorales. Je propose que l’on fasse appel entre autres
aux critères identifiés par Olivier Reboul :
«Un enseignement qui prend la
liberté pour fin est celui qui donne à ses élèves non des performances mais une
compétence, c’est-à-dire le pouvoir de réaliser un nombre indéfini de
performances imprévisibles et pourtant adaptées à la situation.
[…] De même pour l’éducation morale ; la seule digne de ce nom est celle qui ne se contente pas d’inculquer de bonnes conduites mais qui développe la responsabilité et l’autonomie. Ce qui distingue l’enseignement de l’endoctrinement, ce n’est pas que ce dernier soit mensonger, c’est qu’il empêche l’élève de chercher et d’apprendre par lui-même, qu’il réprime la pensée.
Ce qui nous montre, a contrario, que l’enseignement véritable ne va pas sans le développement de l’esprit critique, autrement dit sans le risque que nos élèves finissent pas penser autrement que nous. Bref, une éducation qui prend la liberté pour fin est celle qui donne aux éduqués le pouvoir de se passer de maîtres, de poursuivre par eux-mêmes leur propre éducation, d’acquérir par eux-mêmes de nouveaux savoirs et de trouver leurs propres normes. [...] du moment que la liberté est une fin, elle doit être aussi un moyen privilégié de l'éducation»[4]
Un
nouvel espoir collectif naitra.
Déjà il exige l'ardeur des lucidités exceptionnelles, l'union anonyme dans la foi retrouvée en l'avenir, en la collectivité future.[5]
Déjà il exige l'ardeur des lucidités exceptionnelles, l'union anonyme dans la foi retrouvée en l'avenir, en la collectivité future.[5]
[1] L. Trotsky, Programme de transition, 1938
[2] Manifeste du Refus global, 1948
[3] idem.
[5] Manifeste du Refus global, op.cit.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire