«Most deans I meet have minds unburdened by complicated thought» (Henry Giroux, le 14 mars 2008, McGill).
La meilleure façon de décrire la pensée d’Henry Giroux, je crois, est de prendre la rigueur intellectuelle du matérialisme dialectique, l’analyse profonde de Gramsci, la théorie critique de l’école de Gramsci et l’espoir et l’amour radical de Freire.
Étrange mélange, vous me direz sûrement… peut-être, mais le résultat est un être humain particulièrement extraordinaire, qu’il faut vraiment apprendre à connaître par ses écrits.
Le premier livre que j’ai lu d’Henry Giroux est Ideology, Culture and the Process of Schooling. Non seulement ce livre a-t-il changé la façon dont je vois l’école et l’éducation, mais il a aussi ajouté l’espoir à mon marxisme.
Ce que j’affectionne particulièrement chez Giroux, c’est la marge de manœuvre, la possibilité de transformation qu’il dégage des situations qui peuvent sembler sans issue: «…it is important to demonstrate that hegemony in any of its forms or processes does not represent a cohesive force. Instead, it is riddled with contradictions and tensions that open up the counter-hegemonic struggle…» (Giroux, 1981 : 24). «Radical educators must seize the positive moment that exists amidst the cracks and disjunctions created by oppositional forces that are only partially realized in the schools. To do so, represents a crucial step in translating political understanding into the kind of political struggle that might contest not only the hegemonic practices of the school but also could trace their source back to the wider society. » (31) Les enseignants accompagnent ainsi les élèves dans le développement de leur conscience critique, mais à partir des référents et de la culture première de ces premiers.
Encore :
«In order to move beyond the false notion that schools are merely sites that impose dominant hegemonic meanings and values upon relatively passive students and teachers, a notion of ideology has to be developed that provides an analysis of how schools sustain and produce ideologies as well as how individuals and groups in concrete relationships negotiate, resist or accept them. It suggests looking at the way a dominant ideology is inscribed in : (1) the form and content of classroom material; (2) the organization of the school; (3) the daily classroom social relationships; (4) the principles that structure the selection and organization of the curriculum; (5) the attitudes of the school staff; and (6) the discourse and practices of even those who appear to have penetrated its logic.» (22) Je trouve cet exercice impératif et très enrichissant à essayer avec les élèves du secondaire. J'ai tenté l'expérience de cette analyse avec des élèves de troisième secondaire, et les résultats étaient hallucinants.
Le discours qu’il a prononcé lors du lancement du Projet international Paulo et Nita Freire pour la pédagogie critique traitait de la façon dont la société néolibérale nie l’humanité et l’espoir que représentent les jeunes aux États-Unis. Avant les 15 dernières années, on investissait dans l’éducation, dans l’aide aux jeunes, parce que les jeunes constituent l’avenir. On disait que les jeunes avaient des problèmes qu’il fallait régler, qu’ils vivaient des menaces qu’il fallait éliminer. Aujourd’hui, le discours (particulièrement pour les jeunes de descendance africaine ou latinoaméricaine) est plutôt que les jeunes sont le problème, qu’ils sont la menace. L’avenir devient ainsi problématique et menaçant, les jeunes doivent être la cible d’une régulation sociale proactive et intense (Giroux nous raconte l’histoire d’une petite fille de 6 ans qui a été retirée de sa classe de maternelle par la police parce qu’elle faisait une crise – elle n’a frappé personne, en passant – et a été menotée (au-dessus des coudes, ses poignets étant trop petits) et traîné jusqu’à la station de police). Aussi, une infraction au code vestimentaire peut conduire un élève en prison ! Les jeunes sont jetables, leur contribution non seulement remise en question, mais rejetée d’emblée. Autant d’arguments pour la droite qui veut maintenir le statu quo ou justifier l’érosion de l’État providence comme inutile pour une génération ingrate.
Mais comme le dit si bien Giroux, les craques, les tensions et les contradictions qui caractérisent le discours hégémonique existent comme lieux de notre résistance. Identifions-les et profitons-en !
jeudi 20 mars 2008
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